Interventions des conseillers du groupe UNSA du Ceser de Nouvelle Aquitaine en avril
C’est bien dès aujourd’hui qu’il nous faut engager la bataille pour éviter que l’économie ne reparte comme avant, ce que certains appellent de leur vœux aujourd’hui en voulant limiter drastiquement entre autres les mesures environnementales, et pour que l’événement que nous sommes en train de vivre soit compris non pas comme une catastrophe naturelle dont il faudrait juste savoir éviter le retour – par exemple en érigeant partout des murs et des frontières – mais comme un coup de semonce exigeant une bifurcation radicale.
Le texte adopté à l’unanimité par le bureau du Ceser le 9 avril, posait clairement la question de l’après. Un après qu’il faut imaginer et qui fasse le plus large consensus, non seulement pour sortir de la crise sanitaire actuelle mais aussi répondre aux impasses dans lesquelles le monde s’est engagé sans retenue. Mais avant l’après, il y a demain. La reprise progressive de l’activité économique et le traitement de la crise qui l’accompagnera exigent d’imaginer en parallèle les solutions d’une renaissance de la reprise et les fondements du monde d’après. Veut-on simplement appuyer sur le bouton du modèle d’avant pour recommencer comme avant ? Pour certains, sans doute pas, pour d’autres, la facilité, la vision à court terme, l’intérêt personnel au détriment de l’intérêt général, l’égoïsme étroit, la tentation est grande de repartir sur la dynamique ancienne. Ne soyons pas naïfs, ce danger nous guette.
Les réponses ne sont pas toutes faites, il va falloir tâtonner et sans doute aussi se tromper. Le meilleur moyen de progresser est de sortir des postures et de croiser les points de vue. Ce sont les intelligences plurielles de la société qui seules pourront répondre aux défis qui sont face à nous. Solidarité et mobilisation générale des énergies peuvent aider à sortir demain de la crise sanitaire et atténuer ses dégâts et préparer la construction du monde d’après. Ce qui n’exclut pas le débat, les échanges, les désaccords mais la recherche des solutions au profit de l’intérêt commun et général doit être l’objectif à atteindre.
La crise sanitaire aura au moins mis en lumière certaines priorités essentielles et le virus aura- hélas- fait plus que les mois de grève de nos soignants pour porter la parole du monde hospitalier, pour mettre en évidence notre excessive dépendance, et n’avoir pas considéré à leur juste valeur les dangers d’une économie ultra libérale.
Nous avons besoin d’un programme de développement économique et social équivalent à celui du Conseil National de la Résistance complété par un volet environnemental dessinant les voies que devra suivre notre pays pour organiser une Reconstruction qui soit dans le même temps une Reconversion qui renforcera les services publics et mettra au premier plan les métiers essentiels permettant la satisfaction des besoins sociaux et créant de la valeur pour la société plutôt que pour l’actionnaire en réduisant notamment considérablement l’éventail des salaires et la béance existant entre la hiérarchie des rémunérations d’une part, et celle de l’utilité sociale, d’autre part.
Ce programme devra aussi permettre la ré-industrialisation de notre pays et la relocalisation de secteurs du privé essentiels en temps de crise, en développant des filières de réparation, de recyclage, de fabrication de biens et services durables permettant de rendre les territoires les plus autosuffisants possible.
Il s’agit bien de changer de logiciel pour une vraie transition écologique, technologique et sociale. Le modèle économique actuel menaçait déjà d’imploser devant les conséquences qu’il engendrait et par son incapacité à agir vite et fort sur la réduction des inégalités sociales et le changement climatique.
La, sans doute, très lente sortie de cette crise doit être l’occasion d’une réorientation des activités et de penser à des modèles alternatifs orientés vers la transition écologique et sociale. Chacun a sa part à prendre dans ce travail, même les plus cyniques du néolibéralisme qui peuvent découvrir, à leurs dépens mais aussi du monde entier, l’obsolescence de leur modèle.
De nouveaux rapports au travail, à la santé, à la qualité de vie au travail apparaissent dans l’urgence. Le télétravail ouvre de nouvelles pistes et peut aider à réduire les déplacements, sources de stress, de perte de temps et de pollution, même si la vigilance s’impose et un encadrement strict protégeant les salariés doit être adopté. La conscience qu’une chaîne de production repose sur tous les maillons est à nouveau mise en valeur. Cette évidence ne doit pas être réenfouie demain, mais être revisitée et repensée.
Cette crise met au défi les démocraties dans leur capacité à concilier sécurité et libertés. Il convient de veiller à ce que les institutions, les contre-pouvoirs, les garde-fous, les autorités indépendantes soient renforcées si des restrictions provisoires de libertés sont mises durablement en place.
Le dialogue social doit être au cœur du retour à l’emploi, des relances, des restructurations, des reconversions inévitables si la société ne veut plus poursuivre sa folle route d’hier. Les partenaires sociaux ont fait preuve de leur esprit de responsabilité depuis le début de la crise. Souvent associés, parfois entendus, ils seront les maillons indispensables pour la phase de reprise et la construction du demain : ils ont su faire preuve en ces temps de leur fiabilité et de leur responsabilité.
La pandémie, malgré les difficultés qu’elle induit, a réveillé les moments citoyens et les gestes de solidarité au quotidien. Une prise de conscience peut se faire jour. C’est forte de ces convictions que l’UNSA prendra part à la réflexion collective et à l’action, au Ceser comme ailleurs pour construire une société plus juste et plus respectueuse du vivant.