Le Premier Ministre vient de rendre public son premier arbitrage sur le sujet controversé de la pénibilité, c’est-à-dire des conditions de travail qui altèrent gravement soit la durée de vie, soit l’espérance de vie en bonne santé.
Il a annoncé une double mesure:
– La sortie du compte personnel de prévention de la pénibilité ( C3P) de quatre facteurs (manutention de charges lourdes, postures penibles, vibrations mécaniques, risques chimiques). Pour les salariés en relevant, un départ anticipé en retraite serait possible quand une maladie professionnelle et un taux d’incapacité d’au moins 10% seraient reconnus en fin de carrière. Ce dispositif, improprement baptisé « compte de prévention » par le Premier Ministre, est proche dans sa philosophie de la reconnaissance de l’invalidité que la loi Woerth avait instaurée. Il rompt avec le principe de prévention de la pénibilité du C3P, qui ouvrait droit non seulement au départ en retraite anticipé mais aussi au travail à temps partiel rémunéré à temps plein ou à une formation de reconversion.
– La fin de tout financement spécifique, pour le C3P maintenu comme pour le nouveau » compte de prévention ». Tous deux relèveraient, selon le Premier Ministre, du fonctionnement ordinaire de la branche Accidents du Travail-Maladies Professionnelles de la Sécurité Sociale. Or, s’il est exact que celle-ci est en excédent relatif, ce n’est qu’à court terme. Avec la suppression de tout financement dédié, c’est donc la pérennité du C3P qui est menacée.
La pénibilité est, pour l’UNSA, l’un des dossiers sociaux les plus sensibles. C’est celui qui touche à la pire des inégalités, celle dans laquelle la contrepartie de son travail se paie d’une partie de sa durée de vie ou de sa santé.
En choisissant, plutôt que de trouver des aménagements techniques pour simplifier des problèmes réels de mise en œuvre, de fragiliser le fondement d’un dispositif et sa pérennité, le gouvernement fait preuve d’une injustice profonde, choquante aux plans social et moral.
S’agissant du premier arbitrage public rendu dans le cadre des ordonnances réformant le code du Travail, c’est un signal qui augure mal de l’avenir.